Félicratie, H. Lenoir

Félicratie

Autrice : H. Lenoir, Française

Science-Fiction, One-shot

2021, Sarbacane

Conception de couverture : Claudine Devey

TW : langage châtié et cru (soft), violence (soft), mort animale (soft)

Diversité : pp d’origine probablement arabe, pp et ps saphiques, ps d’origine coréenne, figurants d’origine ethnique variées

« Je m’appelle Yacine, j’ai 16 ans et mon boulot, c’est animal domestique pour extra-terrestres. Parce qu’ils ont gagné, ces couillons. Ils ont envahi la Terre. Et comme leur seul point faible, ce sont les poils de chat, ben croyez-moi qu’on n’a pas le cul sorti des ronces. »

Mon avis

Les invasions extraterrestres représentent un trope plutôt courant en Science-Fiction, que ce soit en livres ou en films, et il n’est pas rare que ces mêmes extraterrestres soient défaits à cause d’un élément présent sur notre Terre qui leur est néfaste (je ne citerai pas de titres, aucazou). Félicratie reprend cette idée là… à sa sauce, c’est à dire en nous en proposant une parodie. Imaginez les xénomorphes d’alien qui habillent les humains en pyjama pilou et qui sont mortellement allergiques aux poils de chat (on aurait eu Jones comme héro badass au lieu de Ripley, donc).

J’avoue que de base, je ne suis pas forcément attirée par les parodies : parfois, j’ai eu l’impression que c’était un empilement de gags et de références, mais sans réelle histoire pour consolider tout ça. Félicratie ne tombe pas dans cet écueil, au contraire, puisque passée la présentation de ce que la Terre est devenue et malgré l’humour omniprésent, on a une vraie histoire d’invasion. La situation n’est pas aussi rose que les pyjamas, loin de là. Les aliens sont réellement dangereux, et on n’envie pas du tout le sort des humains… ni des chats, les deux ayant vu leurs populations drastiquement réduites. Il y a ainsi de vrai moment de tension, et même de violences, car certains humains livrés à eux même peuvent commettre les pires exactions en toute impunité. Heureusement, cela reste soft. Je ne ferai pas forcément lire le bouquin à un enfant, mais il est parfaitement accessible à un ado/jeune adulte.

Cette histoire nous est racontée via deux points de vue principaux : Yacine et Rose, qui nous font partager leurs extraits de journal intime. Yacine est un adolescent d’origine arabe ( a priori, il n’a jamais connu ses parents) qui n’a pas eu une enfance facile, si bien que la vie aux mains des aliens ne lui semble pas si mal. Gamin de banlieue, il s’exprime dans un langage châtié et se trouve être la source principale de l’humour, mais il se révèle aussi très sensible et intelligent. Quant à Rose, jeune adulte, elle était promise à une brillante carrière scientifique, jusqu’à se faire attraper pour devenir la nouvelle humaine de compagnie. Les deux personnages sont extrêmement attachants, complémentaires, et j’ai apprécie d’avoir une alternance de ton dans les points de vue, Rose s’exprimant dans un langage plus « soutenu » compte tenu de son éducation. C’est d’ailleurs une touche de modernité que cette inversion de « valeur », le personnage féminin étant une scientifique qui s’y connaît en bagarre, et le personnage masculin le sensible doué en communication. Cette modernité se traduit aussi par une diversité bienvenue des personnages.

Les chats font par contre office de MacGuffin. Ils ne sont pas si présents que ça dans l’histoire, ils servent avant tout de prétexte et de moteur, sans être de vrais personnages. Par contre, très agréablement surprise des Smnörgs, les fameux aliens. Leur design lui-même n’est pas très original (et c’est normal, il faut qu’on puisse les relier à ce qu’on connaît déjà), en revanche l’autrice évite d’en faire une espèce purement mauvaise, notamment en leur octroyant une culture et un langage originaux et fascinants, avec un vrai propos autour de la communication et de la cohabitation avec des êtres différents, ce qui va aussi avec la diversité humaine du texte.

Bref, une parodie oui… mais pas que, loin de là.

Bilan

Félicratie est une parodie d’invasion extraterrestre qui n’oublie cependant pas de raconter une histoire. C’est fun, moderne, l’humour côtoie les moments d’émotion et de tension, et il y a des thématiques très intéressantes de « vie avec l’autre », passant par la compréhension mutuelle, la culture et la communication. Et puis il y a des chats, que demander de plus ?

Et ailleurs, qu’en pense-t-on ?

(Est-ce que j’ai crocheté le chalien exprès pour cette chronique ? Vous n’avez aucune preuve ! S’il vous plaît, n’hésitez pas à aller faire un tour sur ma boutique 😉 )

4 réflexions sur “Félicratie, H. Lenoir

  1. Pingback: Index : Oeuvres francophones | L'Imaginaerum de Symphonie

Laisser un commentaire