Tress de la mer Emeraude, Brandon Sanderson (Cosmere)

Tress de la mer Emeraude

Auteur : Brandon Sanderson, Américain

High Fantasy

One shot dans l’univers du Cosmere

2023, VO

2023, Le Livre de Poche pour la VF

Traduction : Sébastien Guillot

Illustrations : Howard Lyon

Diversité : ps sourd aux doigts cassés, ps avec une affection visuelle

Tress vit sur une petite île isolée au beau milieu d’un océan… de spores. Simple laveuse de vitres, elle partage néanmoins une belle complicité avec Charlie, le fils du duc, et est secrètement amoureuse de lui. Quand celui-ci disparaît, la jeune femme décide de partir à sa recherche. C’est le début d’un périple au bout du monde, où l’on retrouve tous les ingrédients qui font le sel des grandes aventures : des contrebandiers de la pire espèce, une sorcière malintentionnée, un redoutable dragon, des pirates sales et méchants (ou pas), et même un rat qui parle…

Un livre du Cosmere

Pendant la pandémie, certaines personnes ont appris la cuisine, le crochet ou le macramé. D’autres, comme Brandon Sanderson, se sont dit « tiens, et si j’écrivais un livre en plus de ceux déjà programmés ? ». Rien de plus normal pour un écrivain… sauf qu’il en a écrit QUATRE. Et sans passer par la voix traditionnelle, en plus. Les romans seront publiés simultanément en VO et en VF, une tâche bien trop grande pour la traductrice habituelle de Sanderson : Mélanie Fazi se voit donc épaulée par Sébastien Guillot.

Et malgré ce rythme d’écriture intense, il écrit en plus des bouquins particulièrement qualitatifs. Brandon Sanderson fait partie de ces auteurs dont j’achète chaque sortie sans sourciller, sans même regarder le résumé.

Tress de la mer Emeraude s’inscrit dans l’univers du Cosmere, dans lequel se déroule un certain nombre de ses romans, même si les cycles restent indépendants entre eux. Tress est ainsi un one-shot qui n’appelle aucune suite, et qui ne nécessitera pas de connaissances particulières du Cosmere. Si c’est votre porte d’entrée, certaines choses vous échapperont, mais ça n’entravera pas la compréhension globale. Si, après lecture, vous souhaitez en savoir plus sur les congénères du médecin de bord, je vous redirige vers la série Fils-des-Brumes, si la magie aonique vous intrigue, je vous renvoie vers Elantris. Il y a aussi quelques menues références à Roshar et Warbreaker.

Un mot sur la version collector

A priori, les quatre livres du projet secrets de Sanderson vont connaître une publication sous deux formats papier : une version « classique » et une version collector, qui est celle que je possède. La version collector profite d’une couverture en carton dur, d’illustrations couleur de Howard Lyon, et d’un habillage en couleur pour les parties et ouvertures de chapitre. Les changements de lieu sont aussi indiqués par un code couleur. Perso, je trouve ça très chouette.

Mon avis

Tress se déroule sur une planète que nous ne connaissions pas encore, la planète de Lamar. Bien qu’elle ne bénéficie d’aucun Eclat, elle n’est pas dénuée de magie : 12 lunes stationnaires la surplombent, chacune déversant des spores aussi dangereuses que fascinantes, en nombre tel que ces déversements ont formé autant de mers sur lesquelles il est possible de naviguer… à vos risques et périls. Je ne vous en dit pas plus sur leurs caractéristiques, mais elles sont pour le moins explosives^^

Tress vit sur une île plantée sur la mer Emeraude, qui n’est pas forcément la plus dangereuse, ce qui veut tout dire. C’est une jeune fille ordinaire, laveuse de vitres grande amatrice de tasses, introvertie et profondément gentille et soucieuse des autres, amoureuse d’un jeune homme tout aussi ordinaire, s’il n’avait pas été le fils du duc local. Après la disparition de ce jeune homme, enlevé par la Sorcière alors qu’il naviguait sur la mer de Minuit, elle va se découvrir un courage insoupçonné qui va la conduire sur un vaisseau pirate à l’assaut des mers de spores, aux mains d’une capitaine que n’aurait pas reniée Davy Jones.

L’histoire a apparemment été inspirée par Princess Bride (que je n’ai pas lue, donc… ). Elle est plutôt simple dans son déroulement, mais cette simplicité permet de se familiariser avec cet univers complexe et ses personnages, donc ce n’est pas un défaut à mon sens. Et puis ça repose, de temps en temps. La romance sous-tend évidemment le récit puisqu’on parle d’une jeune femme allant sauver son damoiseau en détresse, mais il n’y a pas de scènes de romances à proprement parler, c’est essentiellement un récit d’aventure.

Dès le début, j’ai beaucoup aimé le personnage de Tress, dont le principal pouvoir est finalement son empathie, qualité encore trop peu considérée, et son évolution est très intéressante et bien amenée, sans que ça paraisse too much. De façon générale, tous les personnages sont sympathiques (à l’exception des antagonistes, of course) et apportent une bonne dose d’humour, notamment ce bon vieux Hoid, qui nous fait d’ailleurs l’honneur de narrer cette histoire (si vous ne connaissez pas Hoid, sachez juste que c’est l’un des personnages les plus mystérieux du Cosmere). Un Hoid pas forcément au mieux de sa forme, ce qui est encore plus drôle. Il en profite pour nous gratifier de réflexions intéressantes sur la nature humaine, la compassion, notre rapport aux autres et à nous-mêmes. Autre truc sympa avec cette narration, c’est que Hoid brise régulièrement le quatrième mur, ce qui donne la sensation que la Terre fait partie intégrante du Cosmere.

Pour en finir sur les personnages, un petit mot sur Fort, le quartier-maître. Fort a eu les doigts cassés par le passé et il est également sourd. N’étant pas concernée, je ne pourrais pas statuer sur le respect ou le réalisme de cette représentation, sachez seulement que Sanderson a fait appel à un’e sensitivity reader. Un petit mot aussi sur Ann, qui est considérée par les autres comme une maladroite ambulante, alors qu’elle a surtout un vrai problème visuel.

Je note ainsi que Sanderson est l’un des rares auteurs de High Fantasy qui inclue autant de personnages handicapés, neuroatypiques et psychoatypiques dans ses romans, et ça fait bien plaisir.

Bilan

Encore un très bon roman de la part de cet auteur ô combien prolifique. La narration est originale par rapport à ce qu’il nous propose habituellement, puisqu’on a ici une histoire racontée par Hoid, ce qui implique une certaine dose d’humour, parfois absurde. Le système de magie est lui aussi inédit dans cet univers, les personnages sont attachants, et même si l’histoire est simple, elle reste sympa à suivre. Il est également doux et optimiste, faisant la part belle à l’empathie et aux valeurs humaines, et ça, ça fait du bien.

Et ailleurs, qu’en pense-t-on ?

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