Les Archives de Roshar (Cosmere) T1 : La voie des rois, Brandon Sanderson

La Voie des Rois est le premier tome du cycle de High Fantasy « Les Archives de Roshar » de l’auteur américain Brandon Sanderson. Il est paru en VO en 2010, puis en 2015 en Français aux éditions Le Livre de Poche. Du fait de son épaisseur, il a été coupé en 2 lors de sa sortie française. Comme les autres oeuvres de Sanderson, la traductrice est Mélanie Fazi, ce qui permet une harmonie entre différents livres du Cosmere. 10 volumes sont prévus.

Note : Cet article chronique la Voie des Rois dans son ensemble, partie 1 + partie 2. A l’occasion de la sortie du Tome 3, je rédige cette chronique alors que je relis le cycle une seconde fois.

Roshar, monde de pierres et d’orages.
D’étranges tempêtes de pouvoirs balaient les terres accidentées tellement souvent, qu’elles ont influencé l’écologie et la civilisation. Les animaux se cachent dans des coquillages, les arbres rentrent leurs branches et l’herbe se rétracte dans le sol. Les cités sont construites uniquement où la topographie offre une protection.
Des siècles ont passé depuis la chute des dix ordres consacrés connus sous le nom de Chevaliers Radieux, mais leurs avatars, des épées et des armures mystiques qui transforment des hommes ordinaires en guerriers quasi invincibles, sont toujours là. Des royaumes sont échangés contre ces objets, des guerres sont menées en leur nom et gagnées grâce à eux.
Une de ces guerres se déroule sur le paysage dévasté qu’on appelle les Plaines Brisées. Là, Kaladin, qui a abandonné ses études de médecine contre une arme pour protéger son petit frère, a été réduit en esclavage. Dans une guerre insensée, où dix armées combattent séparément contre un unique ennemi, il lutte pour sauver ses hommes et pour apaiser les chefs qui les considèrent comme quantité négligeable.
Le Clarissime Dalinar Kholin commande une de ces armées et, comme son frère feu le roi, il est fasciné par un texte ancien appelé La Voie des Rois. Hanté par des visions des temps anciens et par les Chevaliers Radieux, il commence à douter de sa santé mentale.
De l’autre côté de l’océan, une jeune femme appelée Shallan cherche à devenir apprentie de l’éminente et hérétique Jasnah Kholin, la nièce de Dalinar. Bien qu’elle aime apprendre, ses motivations ne sont pas pures, et alors qu’elle planifie un vol audacieux, elle commence à découvrir certains secrets des Chevaliers Radieux, et des informations sur la vraie raison de la guerre.

Univers

Comme pour tous les ouvrages de Sanderson, la magie est presque un personnage à part entière tellement elle est complexe et inventive. Mais avant, un petit mot sur le monde de Roshar.

A noter que même si c’est le cycle qui fait le plus mention du Cosmere, il n’est pas nécessaire à ce stade d’avoir lu les autres œuvres de Sanderson, ni même de savoir ce qu’est le Cosmere.

Roshar est l’un des mondes du système du Cosmere, un monde balayé par des tempêtes titanesques et parcourue d’une faune originale inspirée des crustacés (alors, pas forcément petits, les crustacés, hein, on est sur de la langoustine de compet’ genre Godzilla pour certaines bestioles). Point intéressant et curieusement assez rare en Fantasy, la flore a également été très travaillée, avec pas mal d’espèces différentes inconnues sur Terre. Du coup, faune et flore sont originales et parfaitement adaptées à cet environnement hostile.

Si vous êtes un peu familiers avec le Cosmere, vous savez que l’origine de la magie provient des Eclats d’Adonalsium qui sont tombés sur la planète. Ici, pas moins de deux Eclats : Honneur et Culture. Pour le moment, Culture n’est pas très présente, mais on va souvent vous parler d’Honneur, considéré comme le Tout-Puissant.

Roshar est parcourue de sprènes, des espèces d’esprits, en théorie non doués de consciences à l’exception de quelques spécimens d’ampleur, qui peuvent être liées à la nature (le vent, le feu etc…) ou aux émotions. Par exemple, si vous ressentez de la colère, vous allez attirer les sprènes spécifiques de la colère. Tout simple.

Maintenant que vous avez quelques bases, faisons un aparté sur le passé de Roshar. Régulièrement, des événements appelés Désolations arrivent et menacent le monde. Pour protéger les gens, les Hérauts ont constitué 10 ordres de Chevaliers Radieux, dotés d’armes et d’armures enchantées et de pouvoirs étonnants. Problème : ils semblent avoir trahi le monde… Pourquoi ? Comment ? Est-ce la vérité ? Aucune idée^^

Sans trop entrer dans les détails, parlons magie, donc… Elle est de deux sortes : il est possible d’utiliser des objets particuliers, les fabrials, qui permettent par exemple de transformer les choses ou de fabriquer de la nourriture ; et la Fluctomancie (que pouvaient utiliser les Chevaliers Radieux), qui s’utilise grâce… ben, vous verrez bien 😉

Voilà pour la faune, la flore, et la magie. Du côté des humanoïdes, surtout des humains, mais aussi des êtres mystérieux : les Parshendis. Mais on en parlera un peu plus sur la chronique du T2.

Le racisme est un thème important de ce cycle, puisque la société de plusieurs royaumes tourne autour du principe suivant : les personnes aux yeux clairs sont plus nobles que les personnes aux yeux sombres. On peut donc voir les Pâles-Iris comme une représentation des Blancs, et les Sombre-Iris comme une représentation des Noirs. Le racisme se voit aussi au niveau des parshes, des serviteurs humanoïdes extrêmement dociles, de grande valeur… et traités comme des animaux par les pâle comme les sombre iris.

La société est aussi sexiste et patriarcale, avec un clivage net entre hommes et femmes : pas la même nourriture, pas les mêmes vocations et études etc… Sans parler du fait que pour le peuple Alethi, l’art le plus noble est la guerre, autant dire que la faiblesse et les arts dits féminins (l’écriture, par exemple), ne sont pas très bien perçus…

Pour finir, les humains de Roshar ont une monnaie assez particulière : des gemmes enchâssées dans des sphères de verre. Leur valeur dépend de leur nature (émeraude, diamant etc), et de leur taille. Et aussi, si elles sont infusées ou non (vous verrez ce que ça veut dire).

Mais je vous ai déjà parlé de suffisamment de choses, je vous laisse découvrir comment tout ça fonctionne. Et promis, tout ce que je viens de vous dire est lié d’une façon ou d’une autre. J’espère quand même avoir attisé votre curiosité 😉 Et puis l’univers est tellement riche que c’est difficile de parler de tout…

Personnages

Roshar est ce qu’on appelle un roman chorale, comprenez que plusieurs personnages se partagent la narration. En l’occurrence, principalement trois personnages : Kaladin, Shallan et Dalinar, et quelques personnages secondaires de temps en temps.

Kaladin, ancien chirurgien et ancien soldat dans l’armée du Pale-Iras d’Amaram, est un Sombre-Iris réduit en esclavage après la trahison d’Amaram. Il est finalement vendu à l’armée du Pâle Iris Sadeas, afin de faire partie du Pont Quatre (cf partie intrigue). Compte tenu de son passé, il n’est guère étonnant qu’il ait fini par vouer rancoeur et haine envers les Pâles Iris. Il lui est désormais impossible de leur faire confiance. En revanche, il a bon cœur malgré sa tendance à la déprime et au négativisme, et un profond sens du devoir. Il n’hésitera pas à mettre sa vie en danger pour rendre leur dignité et leur liberté à ses camarades d’infortune.

Shallan Davar est une jeune Pâle Iris d’une Maison mineure, passionnée par le dessin, naïve, d’une certaine timidité malgré une langue vite sarcastique. Afin de sauver sa famille, elle compte bien devenir la pupille de Jasnah Kholin, qui n’est nulle autre que la soeur du roi (et une hérétique même pas mariée à 30 ans ! rendez-vous compte !). Problème, Jasnah est extrêmement exigeante, dotée d’un sale caractère, et elle n’a encore jamais acceptée de pupille. Mais un échec pourrait signifier la mort de toute sa famille…

Dalinar Kholin est lui aussi un Pâle Iris, frère cadet de l’ancien roi Gavilar, oncle du roi actuel Elhokar et de Jasnah. C’est l’un des meilleurs combattants du Royaume, porteur d’une Lame et d’une Cuirasse d’Eclats, des artéfacts légendaires ayant autrefois appartenu aux Radieux. Seulement, il est désormais la proie aux railleries et au mépris. Non seulement il souffre de terribles visions chaque fois qu’une tempête hurle, mais en plus le grand guerrier de jadis n’a… plus envie de faire la Guerre. Autant dire que cette soudaine faiblesse ne va pas tarder à attirer les rapaces…

Parmi les personnages secondaires, notons Jasnah, une érudite qui ne croit pas en Dieu, non mariée, doté d’un fort caractère ; Adolin et Rénarin, les deux fils de Dalinar, l’un un duelliste de talent mais arrogant, le second un jeune homme très gentil mais souffrant d’une maladie qui lui attire le mépris de ses pairs ; les camarades de Kaladin, esclaves hommes de pont aux passés et aux cultures diverses et variées. Vous aurez de quoi faire.

Intrigue

Six ans avant le début de l’intrigue, le roi Gavilar a été assassiné par un étrange individu en blanc doté de pouvoirs du passé, envoyé par les Parshendis, un peuple mystérieux natif des Plaines Brisées. Le roi a été assassiné ? Qu’à cela ne tienne ! Tous les Haut-Princes se sont réunis sur les Plaines avec leurs armées, bien décidés à détruire les Parshendis jusqu’au dernier !

Et puis, avec le temps… La guerre s’est éternisée et s’est muée en une compétition entre les Hauts-Princes. Tout le monde se fiche de savoir pourquoi le roi a été assassiné, tout le monde se fiche du temps que ça durera. Seul compte le Frisson de la bataille. Car les Hommes et les Parshendis convoitent tous les deux les coeurs-de-gemmes. Pour les récolter, il faut tuer d’énormes créatures tandis qu’ils dorment dans leurs chrysalides, sur des plateaux escarpés isolés par de gigantesques gouffres. Mais c’est pas bien grave, puisque des esclaves, on en trouve à la pelle : les hommes de pont doivent donc balader des ponts en bois très lourds afin de permettre à l’armée de traverser les gouffres. Tant pis s’ils meurent sous les flèches des Parshendis sans pouvoir rien faire, après-tout, ce ne sont que des Sombre-Iris.

En parallèle, Jasnah semble avoir complètement oublié la mort de son père, puisqu’elle a passé ces dix dernières années le nez plongé dans les contes et légendes de Roshar. Mais, comme va le découvrir Shallan, ces légendes pourraient bien être liées à la mort du roi et à la guerre… Et à la Grande Tempête qui s’annonce. D’autant que les pouvoirs anciens refont surface.

Ce premier tome sert principalement à poser les bases de l’univers, de l’intrigue et des personnages. J’ai vu sur le net des lecteurs qui ont trouvé le début assez longuet. Et je dois bien avouer qu’il faut attendre pas mal de temps avant que les choses ne se mettent en place, et on a une véritable idée de l’intrigue globale qu’à la fin du tome. Soit après plusieurs centaines de pages de lecture. Si vous aimez l’action, les intrigues nerveuses, les personnages confiants et optimistes, je pense en effet que vous risquez d’avoir un peu de mal. Personnellement, même à la seconde lecture, je trouve cet univers suffisamment fascinant par lui-même. Je ne me suis jamais ennuyée.

(Bon l’image est plutôt tirée du T2, mais c’est pas grave, on va dire que c’est du teasing^^)

Style

Les Archives est beaucoup plus lent que les intrigues habituelles de Sanderson. Il faut dire que l’univers est vaste est complexe, et qu’il faut ce qu’il faut pour pouvoir affronter sereinement la suite. Les personnages sont très travaillés et intéressants, même s’ils ne correspondent pas forcément aux profils qu’on a l’habitude de lire en High Fantasy.

Les chapitres sont racontés à la troisième personne, focale interne, en alternant les points de vue. Si vous avez un peu peur de vous perdre, impossible ici, c’est parfaitement clairs. Les POV alternatifs dans les intermèdes sont parfois déroutants, car difficiles à relier au premier abord avec les intrigues principales. En chaque début de chapitre, vous trouverez une citation énigmatique, que vous ne comprendrez que vers la fin du livre. Les chapitres se déroulent dans un ordre linéaire, mais des chapitres racontant le passé de Kaladin s’intercalent de temps en temps au milieu des chapitres présents.

Petit détail sympa : Shallan dessine, je vous l’ai dit. Et comme elle est érudite, elle dessine sur la faune, la flore etc… Du coup, vous trouverez régulièrement des illustrations issues de ses carnets 😉

Bilan

J’ai une prédilection toute particulière pour la High Fantasy, et les Archives est sans conteste l’un des meilleurs cycles que j’ai lu. C’est complexe, inventif, riche, avec des personnages très intéressants arborant de multiples failles, une magie fascinante, l’auteur prend le temps de mettre en place son monde et son intrigue. C’est divertissant, mais en même temps le cycle vous propose une critique sociétale. Si les pavés et les intrigues « lentes » ne vous font pas peur, foncez ! (promis, avec Sanderson, on aura la fin du cycle 😉 ).

Et ailleurs, qu’en pense-t-on ?

29 réflexions sur “Les Archives de Roshar (Cosmere) T1 : La voie des rois, Brandon Sanderson

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    • Je pense que tu peux t’en sortir, c’est beaucoup moins chaud que le livre des martyrs. Déjà, tu peux essayer un autre livre de sanderson voir si tu aimes bien, avant d’attaquer son gros morceau^^ (warbreaker par exemple, vu qu’il y a de plus en plus de liens avec roshar. La chronique sortira dans les mois qui viennent)

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    • J’ai envie de dire : c’est pas bien grave de ne pas accrocher, on n’a pas forcément les mêmes goûts et attentes. Et en même temps, je comprends le sentiment de ne pas accrocher à quelque chose qui plaît par ailleurs.
      Peut être un jour, oui, et si ce jour n’arrive pas, ça n’est pas grave, il y a d’autres livres !

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